Saturday, August 28, 2010

L'été est fini

Mes excursions de l'été semblent déjà être choses du passé. Fin de semaine en vélo, en kayak, à pied, à la plage, à l'écurie, voilà comment j'ai passé mon temps dans l'innocence de l'été en arrière duquel je cours déjà. Ici il fait froid, il vente, il pleut, je passe le temps en travaillant. Comme à chaque année je me surprends à penser que c'est un peu chez moi ici à l'Aéroport, loin de mon appartement, mes amis, mon cheval, ma vie.

Depuis mon arrivée ici il y a 10 jours à peine les occasions de fêter se présentent et on ne peut pas vraiment rien leur refuser. Une autre équipe de la même compagnie qui a passé quelque jours à Fort Nelson et travaille sur d'anciens sites situés aux abords de l'autorote de l'Alaska nous a parlé d'un chalet trouvé à 70km au sud de la ville, à 15 minutes de marches dans les terres boueuses du nord. Un mot dans le chalet indique que les visiteurs sont les bienvenus, à condition que le refuge soit intact et dans sa condition initiale après usage... Moi qui passe mon 4eme été dans cette ville, j'avais peine à croire que je venais d'entendre une nouvelle si excitante et rafraichissante. En sautant de joie sur mon tabouret de bar dans ma chambre d'Hotel au Super 8 j'ai commencé à gesticuler en m'écriant qu'il FALLAIT absolument qu'on y passe une nuit. Évidemment c'était la fête d'Eric le lundi suivant donc nous avions une excuse pour une aventure nocturne qui allait se dérouler au milieu de nulle part.

Lundi après le travail nous avons à la hâte acheté des saucisses, chips, ketchup, moutarde, pains à hot dog blancs et bière, bien sur, afin de s'assurer que ces aliments allaient se faire bien digérer pendant la nuit. Passage à l'hôtel afin de mettre un oreiller et quelques draps dans nos sacs à dos, et nous étions en route, quatre prisonniers qui s'évadaient vers le vert de la forêt, chantant les fenêtres ouvertes, si fort qu'on ne pouvait douter de notre liberté.

L'autre équipe travaillait à Buckinghorse, au sud de Fort Nelson. Nous nous étions donné rendez vous 3 ou 4 jours avant l'aventure tant attendue. Les foreurs qui travaillaient pour nous allaient partir une heure après nous. Personne dans la voiture ne savait exactement où le point de rencontre était. 70 km au sud de la ville, il y aura un poisson bleu dans un arbre, c'est là. Nous filions sur la route mais pas assez vite, mon estomac se serrait un peu alors que le ciel s'assombrissait et que je réalisais qu'il n'y avait rien, rien, rien autour. Si les autres n'étaient pas au rendez-vous, le plan était de retourner coucher en ville.

Alors que dans la pénombre se sont détachées les silouhettes d'un VUS et un pick up blanc, nous avons criés de joie en faisant d'immenses signes avec les bras et en faisant aller les phares de notre voiture qui même elle semblait contente à l'idée d'une nuit de repos, épuisée d'avoir roulé à cette vitesse folle.

Cris, sauts, rires, on s'ouvre une bière et avec nos lampes de poches et nos sacs à dos nous voilà en route vers le chalet. L'ancien chemin de terre que nous devons suivre est recouvert de boue et d'eau, certains ne portent pas leur bottes de caoutchouc et se mouillent les orteils, les talons, les chevilles et les mollets.

Nous arrivons au chalet, repère secret des cadets de Fort Nelson, où on trouvedes divans, un poele à bois, des dortoirs remplis de lits superposés et une aire aménagée pour un feu de camp à l'extérieur. Nos foreurs nous rejoignent un peu plus tard, arrivent dans le noir avec les bas qui dégouttent et le bas des jeans mouillés.

C'est lundi soir, tout le monde est loin de la maison, on travaille le lendemain. On allume le feu de camps, on mange des hot dogs et des guimauves, on boit de la bière et du fort, sous les étoiles filantes et les aurores boréales. On rit à en pleurer, mes cheveux sentiront la fumée pendant des jours, c'est la fête d'Éric, on danse dans le salon sans musique et sans lumière.

L'été est fini, c'est vrai, il fait froid et il pleut aujourd'hui. Je serai ici encore l'été prochain, à avoir envie d'être à la maison, et quand je retournerai chez moi bientôt, je m'ennuierai de mes aventures du nord.