Wednesday, September 30, 2009

Canada Line

Hier sous la pluie battante j'ai fait mon premier voyage sur la Canada Line, la nouvelle ligne de Skytrain de Vancouver, qui relie le centre-ville à l'aéroport.

C'est ma troisième année ici, et dans Yaletown on s'était habitué à vivre avec le gros trou de Davie et Pacific street, qui nous faisait faire des détours et qui nous invitait à prendre une pause, intrigués, sur le trottoir temporaire en bois à côté du Starbucks. Nos doigts s'aggripaient à la clotûre cage-de-poule et sur la pointe des pieds, le cou tordu, on essayait de regarder au fond du trou. Il était immense et on l'a vu devenir profond, large, puis se remplir d'acier, de béton, de remblai. Un jour ils ont repavé Davie Street en ensuite les clotures sont tombées, et voilà maitnenant il n'y a plus aucun signe du méga trou. Hier sous la pluie le pavé était noir et luisant, les lignes de stationnement blanches et scintillantes.

À l'intersection de Davie et Mainland, à quelques pas du bureau, dans le chic et trendy Yaletown, j'ai emprunté les escaliers roulant et je suis descendue dans l'ex méga trou. Les nouvelles station de la nouvelle ligne sont propres, sans graffiti, sans débris flottant sur le sol, les murs sont gris béton sans taches, ça sent propre. Rien à voir avec l'odeur d'urine et d'humidité qui me revient au nez à chaque fois que je pense au métro de New York en pleine canicule. Oui je sais que ça ne vaut même pas la comparaison, donnons au Skytrain quelques décénnies et on verra. Les wagons ont l'air de jouets en plastique et le petit minou bleu qui recouvre les sièges est doux et fourni.

En empruntant le Canada Line je me sentais ailleurs. Moi qui suit pas mal toujours le même circuit en vélo ou en autobus ou en voiture, je me retrouvais dans une autre ville, une autre personne, roulant dans un petit train sous terre, comme à Londres, Montréal ou New York.

Au retour, ramollie par mon lunch légèrement alcoolisé, j'ai posé ma tête sur une fenêtre et me suis laissé bercée par le train. En sortant du méga trou, un peu surprise de voir cet endroit familier d'un nouvel angle, j'ai levé les yeux, respiré un grand coup. J'ai vu le ciel qui se dégageait et les nuages qui se poussaient sur les montagnes au nord, les montagnes qu'ont voit entre les gratte-ciel, les anciens quai de chargements devenus trottoirs pavés de pierre à la mode, couleur brique-chocolat-petite-mousse-verte, le soleil sur ma tête au travers de la brise fraiche, les trois chiens du monsieur qui va prendre son café au Starbucks à tous les jours. Et moi qui retourne travailler pour une heure ou deux.

Tuesday, September 29, 2009

L'été est fini

La grisaille est de retour. Pas juste la grisaille, la pluie, qui tombe en lames froides et tranchantes. Sous les néons du bureau, la rue dessous est vide.

La nuit je dors la fenêtre ouverte et je me réveille parfois, pour me retourner, tirer la douillette qui m'enfonce dans le matelas, me recouvrir les épaules et les oreilles. Je respire l'air froid qui entre dans la pièce, j'entends la pluie qui tombe, je frissonne et me rendors. Avec Galopin entre mes bras, collé à mon ventre et mes genoux qui remontent pour l'aggriper, le serrer. Galopin qui a fait sa sortie du placard il y a quelques mois. Il dort la tête dans mon cou, je repose mon menton sur sa crinière sauvage. La nuit chez moi, tranquille, l'air frais, les couvertures chaudes.

La pluie et la saison froide et sombre s'annoncent. À cheval les pieds dans la boue, les doigts qui gèlent et les épaules mouillées. La noirceur va nous entourer et tous nous aurons besoin d'oublier, nous aurons besoin de revivre nos nuits d'été, de croire que l'hiver n'est jamais arrivé. Et nous passerons nos soirées sous les lumières artificielles du salon, de la ville, des bars, un drink à la main, comme si on avait trop chaud les pieds dans le sable, comme s'il n'y avait pas de brise pour nous rafraichir, et dans le club on aura chaud aux pieds dans nos bottes d'hiver et quand on rentrera à la maison on aura tellement bu que le froid et la pluie seront le dernier de nos soucis.

Tuesday, September 22, 2009

Bacon and Eggs

Mon amie Miss Fatigue est de retour.

La vie tourbillonne et je me perds un peu, me retrouve, me retourne, m'oublie et je m'endors.

De retour de Cambridge je suis allé au mariage de mes amis et on a bu et chanté et dansé et la soirée était belle et bonne et après des semaines en bottes à cap j'ai reveti une petite robe verte, une écharpe rose, des souliers noirs avec les orteils peints et brillants, une nouvelle sacoche, tout ce qu'il faut pour oublier la vie de tous les jours. Mais vraiment, une journée trop belle pour en parler trop longtemps.

Puis les retrouvailles avec monsieur G et les promenades spectaculaires dans les champs de framboises, surveillés par le tranquille Mont Baker, tout blanc, au loin.
Ensuite une autre expédition remplie de soleil, d'amis. 50 km de kayak en 2 jours, camping, bière, rires, bonheur. La vraie vie et les bons souvenirs en devenir.

Maintenant ici et la fatigue s'installe et j'ai hâte de retourner chez moi et de m'habiller propre pour aller au bureau et d'avoir CHAQUE fin de semaine LIBRE pour DORMIR et monter GRIFFIN. La vraie vie et les bons souvenirs en devenir.

Sinon tout arrive trop vite pour parler de quoi que ce soit. D'autre. De tout de rien, de la boue dans mes cheveux, de Scott qui a eu un nouveau bumper en Illinois et de Amber qui a un rendez vous chez le dentiste, du poulet au vin blanc et du saumon au fromage de chèvre ou encore de la salade avocats-oeuf-bacon qui à volé mon coeur et maintenant je ne serai plus jamais la même car j'y ai gouté et ce soir lentilles au cury, j'espere manger aussi bien quand je serai à la maison.

Thursday, September 3, 2009

J'étais loin

Comme ma vie est mon travail c’est comme si tout ce dont je peux parler, est mon travail? aaaah non non mon cheval, mon (feu) oiseau, mes états d’âmes, mes voyages, ce que j’ai reçu comme cadeau de Noel, la température, la rentrée télé à Radio-Canne, ma famille… nooooon pas ma famille qui me lit, c’est impossible d’en parler ici car ils sauront ce qui se passe dans ma tête pour vrai, quelle vision tordue de la réalité j’ai, oh mon Dieu, après avoir avoué l’an dernier à un souper de famille (lire un souper avec mes parents divorcés depuis 10 ans et ma sœur enceinte et mariée mais sans son mari qui était sur le vieux continent – lire MA famille dont je suis si fière) que j’avais toujours rêvé de foncer à toute vitesse au volant d’une voiture décrépite à travers une clôture de métal texture cage de poule pour en défoncer le cadenas comme dans les films pour ensuite sauter par-dessus une colline de gravelle, puis atterrir dans une étendue d’eau, par exemple le fleuve St-Laurent ou encore False Creek et sauter hors du véhicule alors que celui-ci n’a pas encore touché l’eau, puis disparaitre et laisser derrière moi toute trace de mon existence insignifiante sur cette planète, pour aller ailleurs mener une autre vie tout aussi ordinaire, depuis ce temps je me demande s’ils se demandent ce qui se passe dans ma boîte à clous.

Je dois mentionner que même si à première vue l’aile des départs intra-Canada de l’aéroport d’Edmonton n’est tout à fait aucunement inspirante, il semble que le faux shack en bois rond dans lequel je me trouve en ce moment avec vue sur le tarmac et bière en fut finissent par me prouver qu’il ne faut pas toujours se fier aux premières impressions.

Les derniers jours j’étais à Cambridge Bay, au nord de Vancouver, au nord de Rimouski, au nord d’Umea, au nord du Yukon, au nord du cercle polaire. La première journée il a fait 12 degrés et avec le soleil on se remontait les manches car il faisait chaud et pour avoir l’air tough il faut montrer un peu de peau sur les avant-bras même si on est une fille et que tout le monde autour regarde d’un air un peu louche. Ensuite tout s’est passé comme dans un mauvais film, le brouillard faisant sa place, la pluie par-dessus, le vent au milieu, et moi dessous. Voilà comment pendant le dernier jour du mois d’aout j’ai vu de la neige et des larmes ont coulé de mes yeux verts comme la pelouse de votre voisin, à cause du froid intense et de l’humidité qui vous coupent la peau, vous déchirent les muscles, vous dévissent les os. Voilà maintenant je sais pourquoi les Inuits ont les épaules voutées, pourquoi ils marchent d’un pas tranquille. Je sais maintenant car quand il vente si fort on n’a pas le choix de regarder par terre et on ne peut pas marcher plus vite que notre marche la plus rapide moins le facteur vent qui nous mets ses deux mains robustes sur les épaules.

Kittik, qui a toujours vécu sur cette réserve, m’a dit qu’il aimait y être car ici, ou plutôt là-bas, il n’y a pas d’arbres, donc on peut voir partout autour de soi, tout le temps, au loin, si loin. Je n’avais jamais vécu ça… pas d’arbres, pas de montagnes. Des lièvres, des oies, pas de mouches. Des cailloux, de la poussière. Et moi. Le vendredi soir on est allé au Elks Lodge (les Elks est une sorte de Club Rotary ou de Club des Lions, et le Lodge est leur QG), car à chaque vendredi soir ils ont une soirée BBQ et bière. La ville est une communauté sèche, ie sans alcool, sauf pour le vendredi soir au Elks Lodge. Justin nous a dit qu’un 40 oz d’alcool peut se vendre pour 300$ - oui bon c’est de la contrebande mais quand même. Au Elks Lodge on a mangé un bon steak BBQ avec des patates et de la salade et des oignons et des champignons. Et j’ai bu une bière que j’ai savourée car c’était la seule de ma semaine. Après le souper on est rentré à la maison. On était dans de superbes appartements avec divan en cuir et télé à écran plat, sans hésiter je le crie haut et fort, c’était très beaucoup plus accueillant que mon chez-moi du moment. Angela est la propriétaire de ces appartements, elle doit en avoir une vingtaine qu’elle gère comme si c’était un hôtel, tout est propre et très bien organisé. Elle est blanche dans une communauté Inuit (comme il y en a plusieurs), elle a tout au plus 5 ans de plus que moi. Le prix des matériaux, de la nourriture, de l’essence, est vraiment très élevé là-bas puisque tout est si loin. Je me demande pourquoi elle est là, comment elle a eu les tripes d’investir dans cette communauté, avec quel argent, quels sont ses plans pour l’avenir? Elle a son chien Husky avec elle, un immense bébé d’un peu plus d’un an, qui m’a léché les mains, le visage, les oreilles et m’a senti l’entre-jambe à maintes reprises. Je me demande si je pourrais faire ce qu’elle fait.

J’avais oublié mes lunettes à la maison et le soir alors que je retournais à ma chambre pour la nuit, je me trouvais plutôt assez handicapée, incapable de lire, d’écrire, de savoir quelle heure il était sans avoir l’écran à 3 centimètres du nez. Mais au retour alors que je me suis retrouvée les fesses assise dans le même avion deux fois mais dans deux sièges différents, alors que First Air m’a servi un repas de saumon, puis de bison, alors que l’agent de bord m’apportait mon verre de vin rouge deux ou trois fois plutôt qu’une, alors que par la fenêtre j’ai pu voir le paysage plat et sans arbres et plein d’eau du Nunavut et des territoires du Nord-Ouest, je me sentais vivante, spéciale, unique, chanceuse, anxieuse de retourner à la maison pour une semaine, impatiente d’assister à un autre mariage, cette fois entourée de mes amis du moment qui me manquent tant, curieuse de savoir si la vie va dérouler son tapis rouge pour certaines personnes, pas pour moi, j’ai eu mon tour, en fait le tapis roule et déroule depuis longtemps et je sais que je suis à la première de mon propre film à succès. Impatiente mais nerveuse, les doigts croisés derrière ma robe jaune et grise de Gala et mes plumes lissées et propres et poudreuses et fragiles et si précieuses, je souhaite que tout se passe bien pour celui qui m’est si cher aujourd’hui.